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Loi Littoral Bretagne

La capacité d’accueil littorale, pierre angulaire du contrôle du SCOT : la CAA de Nantes annule la délibération de GMVA pour insuffisance d’analyse

Introduction

Par un arrêt du 18 mars 2025, la cour administrative d’appel de Nantes apporte une précision majeure sur le contrôle juridictionnel des schémas de cohérence territoriale (SCOT) en zone littorale. Elle rappelle que la détermination de la capacité d’accueil des territoires littoraux, exigée par la loi Littoral et le code de l’urbanisme, constitue une condition substantielle de légalité du document d’urbanisme.

Saisie du SCOT de Golfe du Morbihan – Vannes Agglomération (GMVA), la cour sanctionne l’insuffisance d’une analyse jugée trop générale et non territorialisée, ne distinguant pas les communes littorales des autres. En l’absence d’une évaluation précise et complète lors de l’enquête publique, la procédure est entachée d’irrégularité, conduisant à l’annulation de la délibération d’approbation dans son intégralité.

1. Les faits et la procédure

Le conseil communautaire de GMVA a approuvé, le 13 février 2020, son SCOT. L’association Les Amis des chemins de ronde du Morbihan a demandé l’annulation totale de cette délibération devant le tribunal administratif de Rennes, qui n’a annulé que partiellement le SCOT, en ce qu’il identifiait certains secteurs déjà urbanisés comme espaces proches du rivage. L’association a interjeté appel pour obtenir l’annulation intégrale.

Comme le rappelle la cour : « L’association Les amis des chemins de ronde du Morbihan relève appel de ce jugement en tant qu’il a rejeté le surplus de sa demande tendant à l’annulation dans son intégralité de la délibération du 13 février 2020 du conseil communautaire du Golfe du Morbihan – Vannes Agglomération. »

2. Les prétentions et arguments des parties

  • L’association requérante invoque principalement la violation des articles L. 121-3 et L. 121-21 du code de l’urbanisme, reprochant au SCOT l’absence de détermination préalable de la capacité d’accueil du territoire littoral.
  • La communauté d’agglomération soutient que le SCOT n’a pas méconnu les dispositions du code de l’urbanisme et que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

3. Problème de droit

La question centrale est la suivante :
Le SCOT de GMVA a-t-il satisfait à l’obligation de déterminer la capacité d’accueil des territoires littoraux, telle que prévue par la loi Littoral et le code de l’urbanisme, lors de son élaboration et de l’enquête publique ?

4. Solution et portée de l’arrêt

a) Sur l’insuffisance de l’analyse de la capacité d’accueil

La cour rappelle l’exigence légale : « Il revient au schéma de cohérence territoriale de préciser les modalités d’application de la loi Littoral sur son territoire en tenant compte des paysages, de l’environnement, des particularités locales et de la capacité d’accueil du territoire. Il résulte de ces dispositions qu’il appartient aux auteurs du schéma de cohérence territoriale, notamment, de déterminer la capacité d’accueil du territoire concerné qui doit s’entendre comme étant le niveau maximum de pression exercée par les activités ou les populations permanentes et saisonnières que peut supporter le système de ressources du territoire sans mettre en péril ses spécificités. »

Or, le dossier soumis à enquête publique ne comportait qu’une analyse globale et très générale, sans distinction entre communes littorales et autres, ni justification précise :
« le rapport de présentation du schéma de cohérence territoriale soumis à l’enquête publique comprenait deux pages relatives à la « détermination de la capacité d’accueil » de l’ensemble du territoire couvert par le SCOT, sans distinction entre les communes littorales et les autres communes. De plus, les termes du rapport de présentation particulièrement généraux évoquent la volonté des auteurs du schéma de cohérence territoriale de trouver un « équilibre entre le respect de ce que l’on pourrait considérer comme la capacité brute à accueillir (…) et la nécessité de préserver un accueil démographique et économique adapté afin de garantir une mixité sociale et générationnelle, notamment dans les secteurs sous pression foncière du littoral ». »

Les avis de la mission régionale d’autorité environnementale et de la direction départementale des territoires et de la mer du Morbihan avaient d’ailleurs relevé cette insuffisance.

La cour constate donc :
« le dossier soumis à enquête publique présentait une lacune importante s’agissant de l’analyse de la capacité d’accueil des communes littorales […] l’insuffisance du dossier soumis à l’enquête publique a eu pour effet de nuire à l’information complète de la population. La procédure d’enquête publique se trouve dès lors entachée d’une irrégularité entraînant l’illégalité de la décision prise au vu de cette évaluation. »

b) Sur la vaine tentative de régularisation après l’enquête publique

Des développements ont été ajoutés après l’enquête publique, mais la cour juge qu’ils ne suffisent pas à pallier les insuffisances initiales :
« les développements relatifs à la détermination de la capacité d’accueil au titre de la loi Littoral ajoutés, postérieurement à l’enquête publique, dans le rapport de présentation, ne suffisent pas à pallier les insuffisances relevées lors de l’instruction du projet de schéma de cohérence territoriale, notamment par la mission régionale d’autorité environnementale de Bretagne et la direction départementale des territoires et de la mer du Morbihan. »

c) Conséquence : annulation de la délibération

La cour annule la délibération du 13 février 2020 dans son intégralité, réformant le jugement du tribunal administratif :
« La délibération du 13 février 2020 du conseil communautaire de Golfe du Morbihan – Vannes Agglomération est annulée en tant qu’elle n’a pas déjà été annulée par l’article 2 du jugement n° 2001716 du 27 octobre 2022 du tribunal administratif de Rennes. »

5. Apport de l’arrêt

Par cette décision, la CAA de Nantes réaffirme avec force que la capacité d’accueil ne peut être abordée de manière globale ou théorique dans un SCOT littoral. Elle doit faire l’objet d’une analyse spécifique, documentée et préalable, permettant d’apprécier le niveau maximal de pression démographique et économique que les territoires concernés peuvent supporter sans porter atteinte à leurs équilibres environnementaux.

6. Portée pratique

L’arrêt constitue un signal fort à destination des collectivités territoriales littorales. Il rappelle que les insuffisances relevées lors de l’enquête publique ne peuvent être régularisées a posteriori et exposent le document d’urbanisme à une annulation contentieuse totale. La sécurisation des SCOT impose donc une vigilance accrue dans l’élaboration du rapport de présentation.

Référence :
CAA de NANTES, 5ème chambre, 18 mars 2025, 22NT04125 :
« la délibération contestée a été prise sans détermination préalable de la capacité d’accueil des territoires littoraux, en violation des articles L. 121-3 et L. 121-21 du code de l’urbanisme. »

Ronan BLANQUET – Avocat Associé

 

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06Déc2025

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