La Bretagne, région aux 1 700 km de côtes, est l’un des territoires français les plus concernés par la loi Littoral. Ce texte fondamental (loi n°86-2 du 3 janvier 1986) vise à préserver les espaces côtiers tout en autorisant un développement raisonné des territoires.
Mais sur le terrain, l’application de la loi soulève de nombreux débats, entre nécessité écologique et pression foncière croissante. Focus sur les spécificités bretonnes, les règles d’urbanisation, et les enjeux juridiques majeurs.
Un champ d’application étendu en Bretagne
Communes concernées
La loi Littoral s’applique à toutes les communes riveraines :
- de la Manche,
- de l’océan Atlantique,
- et des plans d’eau de plus de 1 000 hectares (ex. : Lac de Grand-Lieu).
La Bretagne compte donc une majorité de communes concernées, des grandes villes côtières comme Brest ou Lorient, jusqu’aux villages du littoral nord de l’Ille-et-Vilaine ou du Finistère.
Objectifs poursuivis
- Préserver les espaces naturels et les paysages côtiers.
- Limiter l’urbanisation diffuse, souvent irréversible.
- Encadrer le développement touristique et résidentiel, notamment les résidences secondaires.
Les règles phares de la loi Littoral
La bande des 100 mètres : une protection maximale (art. L. 121-16 et s. du code de l’urbanisme) :
Sur l’ensemble du littoral, toute construction est interdite dans une bande de 100 mètres à partir de la limite haute du rivage, sauf :
- en zone déjà urbanisée (à l’intérieur du bâti),
- pour certains équipements publics nécessaires.
🔎 En Bretagne, certains PLU étendent même cette bande, en fonction des enjeux locaux (érosion, fragilité des sols).
Les espaces proches du rivage (EPR) (art. L. 121-13 et s. du code de l’urbanisme) :
Ces espaces, définis par les PLU, sont soumis à une urbanisation limitée, strictement justifiée par :
- la configuration des lieux,
- l’accueil d’activités économiques exigeant la proximité immédiate de l’eau.
L’ensemble du territoire communal (art. L. 121-8 du code de l’urbanisme) :
Sur l’ensemble du territoire d’une commune littorale, l’urbanisation ne peut se faire :
- soit, qu’en continuité d’un village ou d’une agglomération :
- caractérisé par un nombre et une densité significatifs de constructions;
- soit, qu’au sein d’un secteur déjà urbanisé
Les espaces remarquables : sanctuarisation des zones naturelles (art. L. 121-23 du code de l’urbanisme) :
Il s’agit des zones dunaire, boisements littoraux, marais, falaises, etc.
Ils sont inconstructibles par principe, sauf exceptions pour les aménagements légers nécessaires à la gestion de ces espaces.
Par exemple, dans l’arrêt du 14 janvier 2025, n°23NT01431, la Cour administrative d’appel de Nantes a estimé que la pointe du Sémaphore à Saint-Quay-Portrieux (Côtes d’Armor) était espace remarquable en raison de la présence de falaises bordant le littoral et de son caractère principalement naturel.
Enjeux et tensions spécifiques à la Bretagne
Une pression immobilière croissante
Les communes du littoral breton, très attractives, font face à une demande forte en matière de foncier :
- Résidences secondaires,
- Locations touristiques,
- Retraite en bord de mer…
Certaines municipalités demandent des assouplissements, au nom du développement économique local. D’autres se satisfont de la protection qu’elle confère au littoral.
Une jurisprudence stricte
Les tribunaux administratifs, Cour administratives d’appel et le Conseil d’État veillent à l’application stricte de la loi.
De nombreuses autorisations d’urbanisme ont été annulées ou refusées en Bretagne ces dernières années :
- Validation d’un refus de permis d’aménager 3 lots à bâtir sur la commune de Plomodiern (Finistère), par le tribunal administratif de Rennes dans un jugement du 7 juin 2024, n°2305029 en raison d’un défaut de continuité avec un village ;
- Confirmation d’un retrait de permis de construire à Porspoder (Finistère), portant sur une maison individuelle par la Cour administrative d’appel de Nantes dans un arrêt du 16 juillet 2024, n°22NT02654), le terrain ne se situant pas dans une agglomération ;
Ces décisions rappellent la nécessité d’une continuité avec un village ou une agglomération et non simplement des constructions éparses.
L’intervention de la DREAL Bretagne
Pour éviter les interprétations divergentes, la DREAL Bretagne a publié un référentiel en 7 fascicules.
Objectif : clarifier les notions de « zone urbanisée », « besoin local », ou « équipement nécessaire », en s’appuyant sur la jurisprudence.
Les outils d’application renforcés
Contrôle des PLU par les services de l’État
Les Préfectures et DDTM examinent la conformité des documents d’urbanisme à la loi Littoral. Des réserves peuvent être émises, voire des modifications imposées.
Formation et sensibilisation
La formation des élus et des services instructeurs est une priorité. La DREAL organise régulièrement des sessions d’explication sur :
- les critères juridiques de définition des zones urbanisées,
- la densité minimale,
- et l’intégration paysagère.
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Maître Ronan Blanquet, avocat en droit de l’urbanisme et de la loi Littoral, vous accompagne.
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Questions fréquentes
Quelles sont les principales règles de la loi Littoral ?
Interdiction de construire en dehors des zones urbanisées dans la bande des 100 mètres, encadrement de l’urbanisation dans les espaces proches du rivage, et inconstructibilité des espaces remarquables.
Peut-on construire dans la bande littorale des 100 mètres ?
Uniquement au sein, à l’intérieure, les zones déjà urbanisées, et sous réserve modifier significativement la densité bâtie du secteur.
Comment savoir si un terrain est impacté par la loi Littoral ?
Il faut consulter le PLU et le schéma de cohérence territorial (SCOT) et vérifier sa situation géographique (proximité du rivage ou d’un plan d’eau > 1 000 ha).
Qui contrôle l’application de la loi Littoral ?
Les services de l’État (Préfecture, DDTM, DREAL) et les juridictions administratives en cas de contentieux.