Dans un jugement du 25 septembre 2024 n°2201381, le tribunal administratif de Caen est venu rappeler que les auteurs d’un document d’urbanisme, en particulier d’un PLU disposent d’une certaine liberté quant au classement des parcelles.
1. Les faits :
En l’occurrence, le 19 février 2022, les requérants ont sollicité auprès de la maire de Fermanville la délivrance d’un certificat d’urbanisme opérationnel en vue de la construction d’une maison d’habitation.
Par une décision en date du 11 avril 2022, la maire de Fermanville a délivré un certificat d’urbanisme négatif en raison du classement en zone naturelle du terrain (Nhd)
Les requérants souhaitent l’annulation de cette décision. En particulier, ils contestent le classement de la parcelle.
2. La liberté laissée aux auteurs du PLU dans la fixation du parti d’aménagement :
Rappelant un principe classique (voire par exemple, Conseil d’Etat, 27 avril 1994, n°138213, inédit au recueil Lebon), le tribunal administratif affirme :
« En premier lieu, il appartient aux auteurs d’un plan local d’urbanisme de déterminer le parti d’aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d’avenir et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Ils peuvent être amenés, à cet effet, à modifier le zonage et à classer en zone naturelle, pour les motifs énoncés à l’article R. 151-24 précité, un secteur qu’ils entendent soustraire pour l’avenir à l’urbanisation, sous réserve que l’appréciation à laquelle ils se livrent ne repose pas sur des faits matériellement inexacts et ne soit pas entachée d’erreur manifeste. »
Autrement dit, il est loisible pour les auteurs du PLU de soustraire des parcelles à l’urbanisation.
3. Considérations ayant permis de classer le secteur en zone naturelle :
Concernant la justification du classement en zone naturelle, il ressortait du PADD et du rapport de présentation que le PLU avait pour objectif de :
- Procéder à un développement équilibré de l’urbanisation de la commune.
- Maîtriser l’étalement urbain en rendant impossible l’extension urbaine des petits hameaux.
- Préserver les paysages de la commune en maintenant un équilibre entre logement, activité agricole et préservation des espaces naturels.
- Tenir compte des risques naturels du territoire.
Plus particulièrement, concernant la situation du terrain, le juge a relevé que :
- Le terrain jouxte un espace naturel sensible.
- Il est éloigné des autres espaces urbanisés.
Il conclut que le classement naturel est justifié, malgré le raccordement aux voies et réseaux divers.
4. Absence d’effet suffisant de la qualification en village :
Sur l’ensemble du territoire des communes littorales, l’urbanisation doit se réaliser en continuité d’un village et non d’une zone d’urbanisation diffuse.
Autrement dit, en application de l’article L. 121-8 du code de l’urbanisme, si un terrain est classé en zone urbaine, mais que ce secteur n’est pas un « village », c’est-à-dire s’il n’est pas caractérisé par un nombre et une densité significative de construire (en ce sens, Conseil d’Etat, 9 novembre 2015, n° 372531), le secteur est inconstructible.
Les requérants entendaient contester le classement en zone naturelle dès lors que la parcelle était en continuité d’un village au sens des dispositions de la loi littoral, et en particulier de l’article L.121-8 du code de l’urbanisme.
La logique des requérants était la suivante : si un espace peut être urbanisé au sens de cet article, le PLU ne peut en disposer autrement.
A cela le juge répond que les auteurs du PLU ont une simple faculté de classer un village en zone urbaine et non l’obligation :
« Les dispositions précitées n’ont pas pour objet d’imposer aux auteurs d’un plan local d’urbanisme d’autoriser l’extension de l’urbanisation dans des hypothèses où elles n’y feraient pas obstacle. Dès lors, le moyen tiré de ce que le classement de la parcelle en litige en zone naturelle méconnaitrait ces dispositions ne peut qu’être écarté. »
Ce n’est donc pas parce que l’inconstructibilité n’est pas prévue par la loi, que le PLU ne peut la prévoir de lui-même.
Ainsi, un espace peut à la fois être potentiellement constructible au regard de la loi littoral, mais inconstructible au regard du parti d’aménagement défini par les auteurs du PLU.
Pauline BIALY – Juriste alternante
Ronan BLANQUET – Avocat Associé
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